Selon Jean-Michel Planche le 28/07/08 11:06: >> En quoi c'est le rôle de l'opérateur de s'occuper de ça? > > Si l'opérateur veut demain jouer un rôle plus central, intelligemment, et ne > pas laisser la place à ceux que tu cites ou d'autres, c'est potentiellement > son rôle.
Mais est-ce vraiment le rôle d'un opérateur IP que d'être au centre du dispositif ? Sauf à vouloir refaire du Minitel ? A en juger par la teneur des propos ici échangés, c'est clairement pas l'objectif souhaité par d'honorables contributeurs :-) > Si il veut rester un interlocuteur crédible et soucieux du bon développement > de l'Internet dans nos pays, c'est clairement son rôle. Justement, on a nullement dit qu'on s'en tamponnait le coquillard, simplement, c'est qu'on estime qu'on peut difficilement demander aux opérateurs de sortir du rôle qui est le leur, sauf à en assumer clairement la responsabilité, aussi bien en amont avec l'adaptation nécessaire du cadre réglementaire qu'en aval avec la gestion des dommages collatéraux qui en résulteront. Depuis plus de 70 ans, un opérateur (de réseau ouvert au public, donc on exclu les réseaux LAN de type entreprise ou campus) est neutre face à du trafic ne mettant pas en péril l'exploitation de son réseau, et doit le rester. Conformément à son cahier des charges, il met en oeuvre tous les moyens nécessaires pour garantir la continuité de l'exploitation de son réseau dans le cadre des normes et prescriptions en vigueur. En dehors de cas bien précis et strictement encadrés, il s'interdit donc de bloquer l'acheminement de communications ne présentant aucun danger pour l'exploitation de son réseau ou des réseaux tiers. Un opérateur a la continuité d'exploitation d'un réseau à garantir. Lequel réseau, de par les interconnexions, voit également passer autre chose que du trafic généré / à destination d'abonnés finals. Et qui se retrouverait in fine impacté par la mise en oeuvre de dispositif de blocage au sein du réseau. Car avant de se perdre en conjectures, ce serait peut être bien de ne pas perdre de vue la demande de départ. L'objectif affiché au niveau politique, c'est que M. et Mme toutlemonde et notamment leurs bambins, ne puissent tomber sur du contenu pédopornographique. Voilà ce qui est demandé, officiellement. En précisant "vous avez toute latitude pour la mise en oeuvre des moyens nécessaires au regard de votre architecture". Or pour surfer sur Internet, il faut à ce stade un terminal ad-hoc : un PC, un smartphone, une console, une WebTV, et tout autre terminal restant à inventer. C'est pas la box qui délivre l'applicatif au client final, il y a toujours à ce stade un terminal qui fait l'interface. Et dans un monde où l'IP commence désormais dès le terminal, c'est pas la box, la clé 3G... qui a la main sur le terminal. C'est l'équipementier, ou l'éditeur du soft, de l'OS. La liaison filaire, radio... n'est là que pour fournir la connectivité IP nécessaire au terminal qui va s'en servir selon ses propres règles d'interprétation des instructions fournies par l'utilisateur final. La liaison fournie par l'opérateur n'est que passive. L'intelligence (et les moyens de la canaliser) est dans le terminal, pas dans le raccordement opérateur (box, clé 3G...). Par essence, hormis le trafic pouvant mettre en péril la continuité de l'exploitation & les intercos, le réseau (et donc la box) d'un opérateur doit tout laisser passer. Vouloir bloquer au sein du réseau du trafic en fonction du contenu véhiculé, c'est prendre le risque de dégrader significativement les performances du réseau, les conditions d'accessibilité pour tout le monde, et in fine la sécurité de liaisons sensibles ainsi que l'apport concret des opérateurs en matière de défense nationale. On fera comment hein le jour où une interception sera prescrite sur les accès DSL/FTTx/3G/4G/whatever d'un réseau de pédophiles présumés ? Ce sont les services d'enquêtes qui vont être ravis, à se palucher du trafic déjà nettoyé qui au final ne leur apportera plus grand chose, alors qu'au contraire Internet était un formidable outil d'optimisation de leurs enquêtes. Allez expliquer cela aux familles et victimes concernées ("désolé, dorénavant ça va prendre plus de temps, on est revenu 10 ans en arrière en matière de démantèlement de filières"). Vous voyez Interpol et autres services d'investigation rendre leurs connexions banalisées pour demander aux ricains une connexion satellite ou déménager dans un pays où ça filtre pas ? Voilà pourquoi il n'aurait pas été inutile de se lancer au préalable dans une étude d'impact avant de lancer l'idée en prenant au dépourvu les opérateurs qui ont découvert avec effarement que cela ne collait nullement avec l'architecture mise en oeuvre chez ceux qui ont de vrais abonnés par millions et qui ont un retour d'expérience significatif. Car ce qui a été présenté, c'est un retour d'expérience sur réseaux nordiques regroupant quelques centaines de milliers d'abonnés dans des configurations ici NAT ou proxy que même le câble y a renoncé ici, et là en ATM jusqu'au BAS (configuration vouée à disparaître prochainement du réseau FT). Et rien sur une configuration se rapprochant de ce qui est mis en oeuvre en France, avec des réseaux maillés, décentralisés et avec un trafic (notamment FFTx) sans aucune commune mesure avec ce qui a été exposé. C'est pourquoi il nous semble plus judicieux, au regard de l'objectif qui une nouvelle fois n'est nullement contesté, d'intervenir là où c'est le plus efficace compte tenu des contraintes évoquées. A savoir au niveau du terminal, en y associant ceux qui ont la main dessus, en l'occurrence les équipementiers et les fournisseurs d'OS. C'est exactement le mode opératoire qui a été suivi pour le contrôle parental sur les mobiles, les équipementiers ont été mis dans la boucle pour développer sur les terminaux les fonctions qui vont bien. Les solutions de filtrage de contenu mises en oeuvre au sein du poste client doivent être mises en avant et proposées systématiquement. Au demeurant, l'ensemble des systèmes d¹exploitation récents (Windows Vista, Mac OS X, distributions Linux grand public, ainsi que leurs déclinaisons embarquées) s'orientent déjà sur cette voie en proposant en standard cette fonctionnalité. Un tel système serait ainsi perçu par les internautes comme moins intrusif que le filtrage dans le réseau réseau ou l'installation d'un logiciel dédié, sous réserve d'une relance des efforts en matière de communication : à l'instar de ce qui a été fait en matière de sécurité routière, il y a des précédents qui ont montré que cela pouvait marcher. En outre, dans une perspective où pointent de nouveaux modes d'accès (FTTx, hertzien...), on a une solution relativement pérenne, indépendante de la couche accès. Et enfin, je pense que les pouvoirs publics seraient plus dans leur rôle en mettant en avant une coopération internationale toujours plus forte, comme celle existant via le réseau INHOPE qui regroupe toutes les hotlines existantes au niveau mondial. Si l'on arrivait à un niveau de coopération tel que chaque hébergeur étranger retire un contenu pédopornographique dès qu'il lui est signalé de façon exploitable, un filtrage au niveau de l'accès n'aurait alors plus de raison d'être. Et comme on aime bien les annonces spectaculaires, la présidence française de l'Union Européenne fournit l'occasion idéale de lancer un tel chantier. Alec, -- --------------------------- Liste de diffusion du FRnOG http://www.frnog.org/