Plop,

Il y a une discussion très importante au RIPE concernant les pratiques
de contournement de la "Last /8 policy" consistant à limiter les
attributions à un seul /22 par LIR.

Le plus gros du contournement se fait par l'ouverture de nouveaux LIR,
le record étant à un membre qui en a crée 50 pour récupérer autant de
subnets.

Les stats couvrant le phénomène sont résumées ici :
https://labs.ripe.net/Members/laura_cobley/ripe-ncc-members-and-multiple-lir-accounts

Vu la teneur des discussions, j'en arrive à formuler un parallèle qui
parlera peut être plus ici que sur members-discuss. Initialement posté
là :
https://www.ripe.net/ripe/mail/archives/members-discuss/2016-February/002109.html

L'idée est qu'on peut faire une analogie entre un inetnum et une licence
de taxi. Une licence comme un inetnum sont gratuits quand ils sont
attribués par l'autorité gestionnaire, mais distribués en quantité
restreinte (dans le cas des licences de taxi c'est à la demande des
titulaires de licences actuels). Ca correspond à la "Last /8 policy"
qu'on a adopté en tant que membres du RIPE (à 5-600 voix sur 13 ou 14000)…

En restreignant l'attribution de nouvelles licences, les titulaires
actuels ont aussi obtenu le droit de se les revendre (listing / transfer
service chez nous). Les titulaires considèrent donc la licence comme un
capital, et certains spéculateurs et rentiers ont achetté autant de
licences que possible pour les louer à de nouveaux conducteurs, créant
un lien de subordination définitif.

Aujourd'hui est apparu une nouvelle façon d'exercer le métier avec
l'émergence des VTC, qui n'ont pas besoin d'une licence rare pour
exercer (pensez à IPv6). Les événements parlent d'eux-même : les
titulaires de licences, rameutés par leurs syndicats tenus par les
rentiers genre G7, les taxi démontent les Uber "en toute cordialité",
allant jusqu'à obtenir du législateur des règles du jeu débiles.

Il y a eu plusieurs solutions proposées, et on a bien entendu retenu la
pire, ou presque. En voici quelques unes :

- Distribuer de nouvelles licences -> la valeur des licences actuelles
s’effondre, les chauffeurs s'en servant comme retraite paniquent et
s'énervent, les escrocs/rentiers publient les trajets compromettants des
politiciens (Qui a balancé Agnès Saal d'après vous ? Ça ressemble à un
coup de semonce pour moi). Dans notre activité, ça consisterai à peu
près récupérer des ERX gaspillées et à les redistribuer.

- Réguler le marché des licences de façon stricte (contrôle des prix) et
les recycler progressivement en les rendant non transferables -> c'est
moins bourrin, mais ça ne règle pas le problème à long terme

- Tout déréguler : imaginez le bazar que les taxi seraient capable de
mettre si on supprimait tout contrôle de licence et donc toute valeur de
celles-ci ? Ils ne se rendront pas compte que ce sont leurs
escrocs/rentiers/syndicats qui sont responsables du foutoir et s'en
prendront aux VTC. C'est un peu le "Let's party 'till it's over" de
l'ARIN, et ça n'a pas contribué au déploiement d'IPv6.


Alors où on va avec tout ça ?

En laissant le marché des inetnum s'établir, le RIPE  -et donc nous,
entant que membres - avons fait strictement la même connerie que ce
qu'on fait les taxis en demandant à pouvoir se vendre leurs licences.

Accentuer la rareté de la ressource avec la "Last /8 policy" avec peu de
contrôle et donc les débordements actuels avec le multi-LIR a eu pour
seul effet d’encourager le développement d'un marché parallèle. C'est la
seconde phase : on ne parle pas de solutions, juste de temporisation.

Si le RIPE n'avait pas encadré à minima le service de transfert, les
choses auraient été encore pire : quand les escrocs et aspirant-rentiers
possèdent quelque chose de rare, ils trouvent toujours moyen d'en tirer
un profit.

Peu importe ce qu'on essaye de mettre en place pour juguler les abus
(valoriser ce qui ne devrait pas avoir de valeur intrinsèque), le
phénomène se produira quand même. À moins qu'une autorité forte ait un
pouvoir opérationnel pour l'empêcher.

Mais comment voudriez vous donner au RIPE le pouvoir de nous tuer en
nous sucrant des ressources ? Et que ce passera-t-il si nous ne
l'organisons pas ?


***
Je vois déjà deux conséquences évidentes à la situation actuelle :

- Les escrocs/rentiers *VONT* prendre le contrôle du RIPE et nous tenir
en otage à un moment où un autre

- Ils se battront contre le seul truc qui peut réduire la "valeur" de
leur ressource rare, à savoir IPv6

(comme si IPv6 avait besoin d'aide pour ne pas être déployé)
***



Je n'ai pas de solution simple et propre pour régler ce merdier, mais
j'aimerais qu'on y réfléchisse ensemble pour trouver le bon équilibre
entre trois axes qui me paraissent essentiels :

- Revoir le modèle économique pour extraire le plus de valeur possible
des rentiers sans pénaliser les petits et nouveaux, donnant au passage
plus de moyens au RIPE

- Casser le sentiment de propriété des adresses, par exemple par
justification périodique, campagnes de renumérotation pour agrégation,
quelques désallocations musclées…

- Tout faire pour protéger la capacité d'un membre à avoir autant de
ressources que ce dont il peut justifier l'usage, pour pouvoir opérer et
concourir.

Avec tout ça, on devrait bien entendu chercher à mettre un terme à toute
possibilité de transfert et revenir à un modèle d'allocation basé sur la
preuve d'usage. Avec des audit systématiques et périodiques.


Qu'en pensez-vous ?

@+

-- 
Jérôme Nicolle
06 19 31 27 14


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